La semaine dernière, j’ai entendu un grimpeur critiquer sa performance après avoir chuté juste en dessous du relai d’un 7b. Il a expliqué qu’il avait manqué un placement de pied, ce qui l’a fait hésiter et tomber. Il a dit que s’il avait grimpé parfaitement, en posant son pied précisément sur la prise, alors il aurait réussi. J’ai commencé à me demander ce que signifiait grimper parfaitement. La perfection existe-t-elle dans le monde, et si oui, qu’est-ce que c’est ?
Les perfectionnistes veulent une performance parfaite et rejettent tout ce qui ne correspond pas à cette performance. À quoi ressemble une performance parfaite ? Nous posons nos pieds, poussons avec nos jambes, saisissons avec nos mains, et faisons des milliers d’autres choses pour grimper. Considérons le grimpeur de 7b. S’il fait tout “suffisamment bien”, alors il réussira la voie en 7b. Que se passe-t-il lorsque des grimpeurs de 8b escaladent la voie en 7b ? Les grimpeurs en 8b ne font pas tout “suffisamment bien”. Ils ont plus d’habileté et peuvent placer les pieds, pousser avec les jambes, etc. plus parfaitement. Mais, qu’arrive-t-il à notre compréhension de la perfection quand des grimpeurs de 9a escaladent la voie ? Et, nous ne pouvons pas nous arrêter là non plus. Certains futurs grimpeurs de 10a pourraient faire un meilleur travail en grimpant la voie en 7b. Cela montre que la perception d’un résultat final de l’escalade parfaite est bancale.

Nous sommes bloqués lorsque nous nous attardons sur des résultats finaux qui ne peuvent jamais être entièrement compris. Les objets physiques ou nos efforts ne peuvent pas être parfaits, parce qu’il n’existe pas d’état final de résultat pour chaque chose individuelle. Un objet comme une chaise peut-il être parfait ? Quelle que soit la qualité de sa fabrication, il aura des défauts. Nos efforts peuvent-ils jamais être parfaits ? Peu importe notre performance, nous pouvons toujours affiner notre manière de grimper.
Le perfectionnisme est une maladie de l’ego, lequel n’est jamais satisfait. Les résultats que nous obtenons ne répondent généralement pas aux attentes de l’ego. Si l’on ajoute à cela le besoin de l’ego de se sentir validé, en fonction de la réalisation de ses objectifs, nous avons peur d’agir. Le perfectionnisme et l’ego nous empêchent de nous engager dans une voie, à moins que nous ne soyons certains de pouvoir créer une performance parfaite. Ils nous font avoir peur de faire quoi que ce soit, car tout doit être parfait.
L’une des meilleures suggestions pour un perfectionniste est de tout faire manière imparfaite. Nous ne nous préoccupons pas de créer un résultat parfait. Nous acceptons une qualité imparfaite en échange d’une action plus rapide. L’action est la clé. Elle est nécessaire pour apprendre et acquérir une expérience progressive qui peut réellement conduire à ce que l’on pourrait considérer comme une performance d’escalade parfaite.
Se concentrer sur les processus peut nous permettre de dépasser le perfectionnisme de l’ego. Nous ne vivons pas dans un vide. Nous faisons partie d’un monde plus vaste et les processus nous aident à nous y intégrer. Les processus, comme se reposer et réfléchir, nous relient à la voie. Nous ne pouvons pas nous reposer dans le vide ; nous devons saisir les prises qui sont des parties d’une voie. Même la réflexion ne peut se faire dans le vide. Nous nous souvenons des expériences que nous avons vécues durant les voies précédentes et nous réfléchissons à la manière de nous appliquer à la voie qui nous attend.
Aborder la perfection comme un processus nous aide à apprendre. Nous passons par un processus d’évaluation de nos forces et de nos limites actuelles, et de leur comparaison avec le défi représenté par la voie. La façon dont nous nous intégrons à la voie représente la perfection du processus, car la roche nous renvoie un miroir parfait de notre niveau de compétence actuel. Ensuite, nous pouvons passer par un processus visant à déterminer ce que nous avons bien fait et ce que nous devons encore apprendre.
Passer de la perfection du résultat final à la perfection du processus nous permet d’être attentifs au déroulement du processus d’apprentissage que nous traversons. Nous remarquons la qualité de nos différents processus, comme le mouvement. Dans quelle mesure plaçons-nous nos pieds, restons-nous détendus, bougeons-nous de manière continue, etc ? De telles observations nous donnent des informations que nous pouvons utiliser immédiatement pour fusionner plus parfaitement avec le rocher, sans le besoin de l’ego d’arriver à un état final parfait.
Il y a une forme de perfection dans le monde. C’est la façon parfaite dont des parties apparemment individuelles s’intègrent et fusionnent ensemble dans un processus. Parfois, ce processus révèle que nous manquons de compétences et nous tombons ; d’autres fois, le processus révèle que nous avons appris de nouvelles compétences et nous réussissons. Dans tous les cas, le processus de fusion s’est déroulé parfaitement, compte tenu de nos compétences actuelles et du défi de la voie. Nous pouvons grimper parfaitement maintenant si nous sommes conscients de la façon dont l’escalade et le grimpeur s’intègrent. Cette intégration révèle un processus parfait qui nous donne des opportunités d’apprendre.
Conseil de pratique : Plier et Fusionner
Chaque effort en escalade révèle la qualité de votre performance. Le rocher est statique ; c’est vous qui vous pliez. Par conséquent, ne vous battez pas contre le rocher ; pliez-vous à ce que l’escalade exige au lieu d’y résister. Ensuite, concentrez-vous sur les processus qui vous aideront à fusionner avec lui.
L’un des principaux processus que vous pouvez mettre en œuvre pour fusionner avec le rocher est de vous détendre. La détente vous permet de vous aligner sur la gravité et de vous déplacer efficacement. Contrôlez le niveau de tension nécessaire pour les différents mouvements. Ensuite, relâchez votre prise, abaissez vos talons et relâchez toute tension inutile. Vous créerez un processus parfait en vous pliant à ce que l’escalade exige puis en fusionnant avec elle.