Il y a quelques années, David Villegas, notre entraîneur espagnol, et moi donnions des cours à Chacabuco, au Chili. Lors de notre dernier stage, nous avons entendu une fille poser une question à son assureur : “Est-ce que c’est ok de chuter ici ?” Elle était en train de faire une traversée en s’éloignant de son dernier ancrage, elle était complétement fatiguée et risquait une chute en pendule. David s’est tourné vers moi et m’a dit : ” Je suppose que tu as un autre sujet pour tes leçons par courriel. Comment voulons-nous savoir si c’est ok de chuter, par quelqu’un d’autre ou par nous ?”.
Poser une question implique qu’une décision a besoin d’être prise ; nous décidons de nous engager ou non dans l’action. Les décisions séparent la préparation de l’action. Nous nous préparons en réfléchissant au risque, en collectant des informations. Nous agissons en le faisant, en grimpant au travers du risque. Le but de la prise de décision est de confronter ce que nous découvrons lors de la préparation à notre expérience afin de prendre un risque approprié.
Qu’est-ce que cela signifie de prendre un risque approprié ? “Approprié” signifie pour nous, des risques qui nous poussent hors de notre zone de confort, mais qui diminuent aussi les risques de blessure. Si nous sortons trop de notre zone de confort, nous risquons de nous blesser, de renforcer notre peur ou de mourir.
Alors comment déterminer ce qui est un risque approprié pour nous ? Tout d’abord, nous évaluons si nous nous trouvons dans une zone de oui chute ou de non chute. Une zone de oui chute signifie qu’il est probable que nous ne serons pas blessés si nous chutons. Une zone de non chute signifie que nous risquons de nous blesser ou pire si nous tombons.
C’est là que ça se complique. Comment savoir si l’on risque de se blesser ? Le mot clé ici est “savoir”. La Voie du guerrier insiste sur le fait que la connaissance intellectuelle n’est qu’un début. Pour vraiment connaître quelque chose, nous devons en faire l’expérience. Par conséquent, pour savoir ce qui est une zone de oui chute appropriée, nous devons avoir l’expérience des types de chutes auxquelles nous sommes confrontés.
Aussi, la prise de décision sur ce qui constitue un risque approprié n’est pas un processus analytique, mais intuitif. La décision ne se limite pas à une évaluation analytique de toutes les chutes passées par rapport aux statistiques de la chute actuelle. Elle comprend également la fréquence à laquelle nous avons pratiqué des chutes récemment, les types de chutes que nous avons pratiquées et l’endroit où nous les avons pratiquées. Ces informations sont trop nombreuses pour être évaluées de manière analytique.
Intuitivement, cependant, nous pouvons les évaluer avec précision. Pour ce faire, nous devons prêter attention à la résistance que nous éprouvons à l’idée de prendre le risque. S’il y a trop de résistance, cela signifie que le risque est trop éloigné de notre zone de confort. Un risque “approprié” est donc un risque qui nous pousse un peu en dehors de notre zone de confort et pour lequel nous ressentons une résistance modérée.
La chute est la conséquence des décisions que nous prenons en escalade. Si nous comptons sur les autres pour prendre ces décisions à notre place, nous risquons de nous blesser car ce qui est approprié pour les autres ne l’est pas pour nous. Nous blâmerons les autres si nous nous blessons parce que nous nous sommes fiés à eux pour évaluer les risques au lieu de prendre la responsabilité de le faire nous-mêmes. Il est préférable d’accepter la responsabilité de nos décisions et de nous fier à nous-mêmes pour déterminer ce qui est approprié. En agissant ainsi, nous conservons notre pouvoir et nous sommes directement informés des conséquences de nos choix. Il n’y a personne à blâmer. Nous sommes en mesure de nous concentrer plus directement sur ce que nous pouvons apprendre des résultats que nous créons.
Si nous avons besoin de demander à quelqu’un d’autre : “Est-ce que c’est ok de chuter ici ?”, alors nous devons en prendre conscience. Nous donnons notre pouvoir aux autres et avons besoin de le récupérer. Pour ce faire, nous nous entraînons à tomber afin d’acquérir des connaissances expérientielles sur la chute, nous nous entraînons à évaluer les risques par rapport à notre expérience de la chute et nous prêtons attention au niveau de résistance que nous ressentons à l’idée de prendre le risque. Ce faisant, nous concentrons notre attention sur nous, sur un processus qui nous aidera à prendre un risque approprié. Cela ramène notre attention sur nous afin que nous puissions développer notre puissance mentale et savoir ce qui est approprié.
Conseil pratique : Ressentir la résistance
La prise de décision n’est pas un processus analytique ; c’est un processus intuitif. Faites appel à votre intuition pour pouvoir prendre des décisions appropriées en matière de risques. Pour ce faire, prêtez attention au niveau de résistance que vous ressentez (et non que vous pensez).
- Haut niveau de résistance : le risque n’est pas approprié.
- Moyen niveau de résistance : le risque peut être approprié ou non.
- Bas niveau de résistance : le risque est probablement approprié.
Lorsque vous ressentez un niveau moyen de résistance, trouvez de “petites façons de s’engager” pour aider à rapprocher le sentiment de “haut” ou “bas”.
Le livre Espresso Lessons (ndt: pour l’instant seulement en anglais) explique plus en détail comment prendre des décisions intuitives.