Je suis un bourreau de travail. J’étais connu pour me lever à 3 heures du matin, faire une heure de trajet pour me rendre à mon travail et travailler jusqu’à 21 heures, jour après jour. Ce n’est pas sain. Je ne travaille plus comme ça aujourd’hui, mais je le faisais quand je travaillais dans l’entreprise d’outils industriels de mon père. Pourquoi travaillais-je de la sorte ? La nécessité était en partie la raison. Nous étions des entrepreneurs, donc la responsabilité de mener à bien le travail reposait sur nos épaules. Mais travailler selon un tel horaire, année après année, indique que les motivations ne sont pas alignées sur la nécessité. Peut-être me suis-je perdu dans l’agitation (NDT : busyness dans le texte original en anglais) au lieu de faire un travail intentionnel ?
Blaise Pascal, philosophe français du 17e siècle, a dit : “Tout le malheur des hommes vient d’une seule chose qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre.” Les motivations de l’esprit peuvent créer des malheurs dans nos vies. Ceci peut amener à confondre agitation et travail. En apprenant à s’asseoir tranquillement et à être silencieux, nous pouvons observer l’esprit. À partir de ces observations, nous pouvons aller au-delà du malheur et profiter davantage de notre vie.
Nous avons tendance à être motivés par l’agitation. Cela nous donne le sentiment d’être en vie. Nous sommes actifs et en mouvement. L’agitation externe peut indiquer un état d’esprit interne occupé. Notre attention se déplace vers l’esprit, où elle se perd dans les pensées et dans le désir de parler et d’exprimer ce que nous pensons. Le fait de penser et de parler crée un environnement mental bruyant.
Deux motivations composent notre environnement mental : le désir d’être mis au défi (travailler) et le désir d’être confortable (se reposer). Ces deux motivations sont importantes. Par conséquent, nos motivations ont besoin de se compléter plutôt que de se concurrencer. L’agitation tend à susciter une compétition anxieuse entre le stress et le confort ; l’intentionnalité tend à les équilibrer de manière complémentaire.
Être occupé peut nous donner les moyens de réaliser des objectifs. Ces réalisations peuvent nous donner un sentiment d’estime de soi. Mais, comme nos motivations sont en compétition, notre attention est distraite. Notre attention a tendance à se déplacer vers un désir de confort lorsque nous sommes occupés. Puis, lorsque nous sommes confortables, nous désirons être occupés afin de pouvoir réaliser à nouveau d’autres objectifs. Nous sommes pris dans un cycle d’anxiété qui s’autoperpétue, perdus dans la prison de l’environnement bruyant et compétitif de l’esprit.
Alors, comment pouvons-nous changer cette tendance à l’agitation orientée vers la réussite ? Nous changeons notre orientation. L’orientation vers l’agitation a tendance à être une façon carte-vers-terrain d’interagir avec la vie. Nous vivons dans les cartes de la vie créées par notre esprit, dans un environnement mental bruyant, et nous projetons ces cartes sur le terrain du monde extérieur.
Pour sortir de cette prison mentale, il est nécessaire de changer notre orientation. Nous commençons par le terrain, puis nous passons à nos cartes mentales. Pour ce faire, il faut appliquer le silence. Nous décidons de “demeurer en repos dans une chambre”, comme le suggère Pascal. Nous faisons cela en concentrant notre attention sur le terrain. Notre attention est engagée dans nos sens plutôt que dans notre esprit pensant. Nous pouvons mieux remarquer les intrusions de l’esprit à partir de cette perspective.
Avec une orientation de type “terrain-vers-carte”, notre attention est mieux engagée dans la tâche que nous accomplissons. Lorsque nous travaillons, nous nous engageons à travailler et cessons de désirer un moment futur où nous serons confortables. Au contraire, nous recherchons le confort au milieu du stress en nous détendant, et nous consacrons 100 % de notre attention au travail. Ensuite, quand il est temps de se reposer et d’être dans notre zone de confort, nous cessons de désirer travailler. Au contraire, nous ne vérifions pas nos e-mails et nous ne travaillons pas ; nous nous détendons dans notre confort, en consacrant 100 % de notre attention au repos.
Il est plus facile de comprendre ces concepts intellectuellement que de les vivre. Mais c’est ce que nous avons besoin de faire. Nous avons tous de longues listes de choses à faire. Intellectuellement, nous savons que nous n’arriverons jamais à tout faire, que nous aurons tendance à être anxieux lorsque nous serons stressés, et que nous associerons valeur et réalisation. Nous vivons ces concepts pour passer de la connaissance intellectuelle à la connaissance par l’expérience.
Comment faire ? Je vous ai donné des pistes plus haut. Nous changeons notre orientation vers le silence. Nous observons l’esprit, nous concentrons notre attention sur la pensée et la parole, et nous la redirigeons vers le terrain. Le fait de déplacer notre attention sur le terrain calme l’esprit, ce qui nous permet d’être plus conscients. À partir de cet espace de conscience, nous décidons de la tâche à accomplir et nous y consacrons toute notre attention. Si notre attention se porte sur le confort alors que nous travaillons ou vice versa, nous la réorientons vers la tâche. En alternant de manière opportune travail et repos, nous apportons un équilibre à notre vie et réduisons l’anxiété.
Le silence nous aide à vivre notre vie sur le terrain du monde au lieu de nous perdre dans notre esprit. Le dialogue intérieur bruyant diminue, ce qui nous permet d’observer l’esprit à des niveaux plus subtils. Nous ne sommes pas perdus dans un esprit bruyant qui pense et parle sans cesse. Nous concentrons notre attention sur le terrain du monde et observons en silence. Cela nous aide à trouver notre chemin hors de notre misérable prison mentale qu’est l’agitation, créant ainsi plus d’intentionnalité dans nos vies.
Conseil Pratique : Pourquoi faites-vous ce que vous faites ?
Évaluez la motivation qui se cache derrière votre agitation :
- Désirez-vous le confort lorsque vous travaillez ? Exemple : pensez-vous à un week-end confortable alors que vous êtes en plein travail ?
- Désirez-vous travailler lorsque vous vous reposez ? Exemple : travaillez-vous le week-end tandis que vous devriez vous reposer ?
Ces questions peuvent vous donner un aperçu de votre motivation. Maintenant, appliquez le silence pour les expérimenter. Arrêtez de penser et de parler. Choisissez de travailler ou de vous reposer et engagez-vous à le faire. Puis passez en temps opportun à son opposé.